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Retour à la listeCertaines préoccupations ont été soulevées par des ergothérapeutes quant à la possibilité d’utiliser une approche, une méthode ou encore un programme d’intervention unique. Plus précisément, la question est la suivante :
une offre de services basée sur une approche unique (p. ex. : co-op, intégration sensorielle) ou sur une méthode unique (p. ex. : padovan, masgustova) ou bien encore sur un programme d’intervention unique (p. ex. : teaccH) est-elle compatible avec le respect des normes et de la réglementation en ergothérapie ?
Le présent article énonce certains éléments que l’ergothérapeute doit prendre en compte afin de répondre à ce questionnement.
D’entrée de jeu, il importe de préciser que l’utilisation d’une approche/méthode/programme (ci-après appelé approche) d’intervention unique comme moyen d’intervention ne soustrait en rien la nécessité que cette approche s’inscrive dans un processus d’intervention en ergothérapie. Autrement dit, il faut s’assurer :
- que la demande de services reçue est recadrée en fonction du champ d’exercice de l’ergothérapie ;
- qu’une évaluation en ergothérapie est réalisée et documente adéquatement les enjeux occupationnels du client, incluant les facteurs personnels et environnementaux ;
- qu’un plan d’intervention (PI) est élaboré en fonction de ces enjeux occupationnels ;
- qu’une évaluation de l’évolution du client est faite en cours d’intervention en fonction des objectifs poursuivis (essentiellement occupationnels) ;
- qu’une évaluation de l’atteinte des objectifs (essentiellement occupationnels) est réalisée à la fin de l’intervention.
Il faut alors s’assurer que l’ensemble de ce processus est cohérent et qu’il justifie les moyens d’intervention retenus au PI. De cette manière, si une approche unique est retenue, cette approche doit découler des résultats obtenus lors de l’évaluation et permettre de soutenir l’atteinte des objectifs d’intervention axés sur les occupations du client (ou encore, ses habitudes de vie, ses activités signifiantes ou ses activités de la vie quotidienne selon le modèle théorique retenu).
Il faut aussi considérer que l’ergothérapeute a un devoir de compétence. Il doit exercer sa profession selon les normes généralement reconnues et les règles de l’art (Code de déontologie des ergothérapeutes, a.15). Ainsi, les approches d’intervention proposées au regard des objectifs d’intervention doivent s’appuyer sur les pratiques reconnues et, le cas échéant, sur les évidences scientifiques. Par exemple, si les évidences scientifiques démontrent que l’utilisation d’une combinaison d’approches est privilégiée à une approche unique pour les interventions ciblant une clientèle particulière, il est donc généralement attendu que l’ergothérapeute qui intervient auprès de ladite clientèle ait une pratique qui respecte ces évidences. De plus, cela implique également que le choix d’une approche d’intervention unique ne devrait pas se faire sur la base d’une préférence personnelle au détriment d’évidences scientifiques et de pratiques reconnues.
Finalement, en vertu de l’article 31 du Code de déontologie des ergothérapeutes, le client doit donner son consentement libre et éclairé au plan d’intervention. À cette fin, l’ergothérapeute doit présenter au client une description de l’intervention proposée et leurs alternatives, incluant leurs avantages et inconvénients respectifs. Par exemple, lorsque l’ergothérapeute envisage une approche unique dont la complexité de mise en application implique un temps ou une fréquence d’intervention accrus (pouvant selon le contexte engendrer des impacts financiers ou organisationnels pour le client), ces considérations doivent être expliquées au client ainsi que les alternatives proposées. De plus, dans le cas d’approches d’intervention insuffisamment éprouvées, les réserves appropriées doivent être communiquées au client.
En résumé, un ergothérapeute qui désire utiliser une approche unique doit s’assurer que cette utilisation s’inscrit dans un processus d’intervention ergothérapique, que cette approche s’appuie sur des évidences scientifiques ou des pratiques reconnues et que le client y consent librement et de manière éclairée. En d’autres mots, l’ergothérapeute se doit de respecter l’ensemble des normes et de la réglementation applicables à sa pratique.