Tenue des dossiers en ergothérapie
Retour à la listeL’ergothérapeute doit rendre compte du résultat de l’évaluation (et de toute réévaluation) et de son analyse (art. 6 (8o) R.TDD).
Le résultat de l’évaluation comporte la description :
- des habitudes de vie du client (occupations/activités significatives) pertinentes à la situation;
- des facteurs personnels (capacités/incapacités) et environnementaux pertinents (qui influent sur lesdites habitudes de vie).
Comment déterminer
- les habitudes de vie, facteurs personnels et facteurs environnementaux « pertinents » à documenter? et
- le degré de détail de la description des données?
De façon générale, et à moins que la loi ne le prévoie autrement, les données à documenter seront, parmi celles recueillies lors de l’évaluation, toutes et uniquement celles pertinentes à la situation.
Bien que l’étape de planification des données à recueillir ne fasse pas l’objet du présent Guide (puisqu’elle fait partie de la planification de l’intervention et non pas de la production de la documentation qui s’y réfère), il a néanmoins été jugé pertinent d’identifier certains éléments sur lesquels l’ergothérapeute devrait se baser pour orienter son jugement professionnel à cette étape. Ils se trouvent ci-après. Ces éléments ne constituent pas une liste exhaustive. Ainsi, selon la situation, d’autres éléments pourraient devoir être pris en compte.
Description des habitudes de vie du client
Éléments permettant d’orienter le jugement professionnel de l’ergothérapeute à l’égard à la fois de (A) la détermination des habitudes de vie sur lesquelles des données seront recueillies et (B) le degré de détail lié aux habitudes de vie que l’ergothérapeute a jugé pertinent de recueillir :
- l’objet (motifs) de la demande de services;
- le type de services offerts (qui est à son tour tributaire de l’offre de services du milieu);
- les attentes du client.
Exemple habitudes de vie A
Exemple habitudes de vie B
Description des facteurs personnels pertinents
Éléments permettant d’orienter le jugement professionnel de l’ergothérapeute à l’égard :
A. de la détermination des facteurs personnels sur lesquels des données seront recueillies :
- présence d'un lien entre un facteur personnel et la perturbation ou le maintien d'une habitude de vie pour le client.
Exemple facteurs personnels A
B. du degré de détail lié aux facteurs personnels que l’ergothérapeute a jugé pertinent de recueillir :
- l’objet (motifs) de la demande de services (qui est à son tour tributaire de l’offre de service du milieu);
- l’ampleur de la contribution du facteur personnel à la perturbation ou au maintien de l’habitude de vie.
Exemple facteurs personnels B
Description des facteurs environnementaux pertinents
Éléments permettant d'orienter le jugement professionnel de l'ergothérapeute à l'égard :
A. de la détermination des facteurs environnementaux sur lesquels des données seront recueillies :
- présence d’un lien avéré ou potentiel entre un facteur environnemental (obstacle ou facilitateur) et le niveau de réalisation d’une habitude de vie.
Exemple facteurs environnementaux A
B. du degré de détail lié aux facteurs environnementaux que l’ergothérapeute a jugé pertinent de recueillir :
- l’objet (motifs) de la demande de services
- l’ampleur de la contribution du facteur environnemental à la perturbation ou au maintien de l’habitude de vie.
Exemple facteurs environnementaux B
Inscription de l'interprétation des données
L’interprétation consiste à expliquer, éclaircir et donner une signification à des données. Elle s’applique aux données interprétables recueillies par diverses méthodes d'évaluation et instruments de mesure.
Balises
L’interprétation prend appui sur diverses balises, notamment :
- les normes de référence en la matière (p. ex. : normes d’amplitude articulaire, stade de développement de l’enfant selon l’âge, etc. );
- les grilles d’interprétation et normes associées à un instrument de mesure standardisé;
- les normes individuelles (p. ex. : hémicorps sain; profil antérieur).
Facteurs à considérer
L’interprétation des données tient notamment compte :
- de la visée de l’activité évaluative. Le guide explicatif concernant le projet de loi 21 en distingue certaines catégories selon leurs principales visées, notamment :
- le dépistage (Balises de rédaction et exemples);
- l’appréciation (Balises de rédaction et exemples);
- l’évaluation (Balises de rédaction et exemples);
- de la nature des données recueillies selon la méthode utilisée. En effet, en fonction de la méthode utilisée on peut généralement y associer certaines caractéristiques aux données recueillies. Par exemple :
- l’entrevue : les données recueillies par entrevue ont généralement pour objet la perception de la personne concernant la situation (Balises de rédaction et exemples);
- la mise en situation : les données recueillies par mise en situation ont généralement pour objet des comportements observables de la personne (Balises de rédaction et exemples);
- l’instrument de mesure standardisé : les données recueillies par un instrument de mesure standardisé ont généralement pour objet des éléments ciblés et définis (notamment des aptitudes, des habitudes de vie) [Balises de rédaction et exemples];
- du contexte d’évaluation :
- degré de familiarité et de généralisation de :
- l’environnement (p. ex. : milieu naturel, environnement simulé, chambre d’hôpital, etc. );
- la situation ou l’activité (p. ex. : connue, similaire à une activité connue, nouvelle, etc. );
- état (physique, mental ou psychologique) du client (p. ex. : niveau d’éveil, niveau de fatigue, effet de la médication, état d’ébriété, état de choc, délirium, etc. );
- degré de familiarité et de généralisation de :
- du champ d’exercice et des activités réservées aux ergothérapeutes et autres professions réglementées.
(Par exemple, lorsque l’ergothérapeute utilise un instrument de mesure dont l’interprétation mène à conclure à la présence d’un trouble neuropsychologique ou mental, il devra se limiter à indiquer si les scores obtenus, par exemple, se trouvent dans les normes ou sous la norme ou, encore, le rang percentile correspondant aux scores obtenus. )
Pour en savoir plus, voir l’article Agir dans son champ d’exercice : la vigilance s’impose! publié dans l’Ergothérapie express de mars 2010.
- du résultat de la triangulation des données.
- la convergence d’indices tirés de résultats de plusieurs sources (soit plusieurs méthodes ou plusieurs instruments de mesure) permet de renforcer leur valeur;
- la divergence de résultats exige pour sa part une plus grande attention à la pondération de la valeur de chaque résultat et des limites de chaque méthode ou instrument de mesure.
Comment s’assurer de rendre compte de l’interprétation des données de façon claire et précise?
Une inscription claire et précise de l’interprétation des données devrait permettre de répondre positivement aux questions suivantes :
L’interprétation :
- s’appuie-t-elle sur des normes ou des critères établis?
- reflète-t-elle les objectifs et les limites des méthodes d’évaluation et des instruments de mesure utilisés?
- permet-elle au lecteur d’en saisir la signification explicite et nuancée?
Description des liens analytiques
L'analyse
Rendre compte des liens analytiques (communément appelé « analyse ») consiste à expliquer les rapports qui relient les unes aux autres les diverses parties d’un ensemble.
En ergothérapie, l’analyse consiste à établir l’ensemble des liens justes et pertinents entre les facteurs personnels, les facteurs environnementaux et les habitudes de vie (occupations) du client.
Pour ce faire, l’ergothérapeute :
- porte un regard critique sur l’ensemble des données recueillies à l’évaluation et leur interprétation;
- identifie les enjeux occupationnels du client et leur importance relative;
- explore les explications potentielles des enjeux occupationnels du client en regard des facteurs personnels et environnementaux qui influent sur les habitudes de vie du client.
Rendre compte des liens analytiques consiste donc à rendre explicite son raisonnement clinique. En d’autres mots, l’analyse doit permettre de comprendre pourquoi (facteurs causaux) le client présente des difficultés, ou non, à réaliser ses habitudes de vie.
Par conséquent, une synthèse des résultats d’évaluation ne constitue pas une analyse.
Comment puis-je juger de la qualité de l'analyse écrite?
La description des liens analytiques devrait répondre aux critères de qualité suivants :
L'analyse
- est étroitement liée à la demande de services;
- établit l’ensemble des liens pertinents entre les facteurs personnels, les facteurs environnementaux et les habitudes de vie du client, préalablement décrits dans les données évaluatives (aucun élément nouveau ne devrait se retrouver dans l’analyse).
- comporte des liens analytiques justes et précis. Ils sont notamment nuancés en considération des limites des résultats obtenus en regard des méthodes et instruments d’évaluation utilisés;
- explique et qualifie le degré de fonctionnement de la personne dans ses habitudes de vie en les rapportant selon une hiérarchie décroissante d’importance des habitudes de vie perturbées;
- exprime clairement et de manière concise le raisonnement clinique de l’ergothérapeute sur la situation du client;
- utilise un vocabulaire respectueux du champ d’exercice et des activités réservées aux ergothérapeutes et autres professions réglementées;
Exemple - soutient l’opinion professionnelle et les décisions de l’ergothérapeute dans l’élaboration du plan d’intervention du client et des recommandations.
Comment déterminer le degré de détail et de profondeur de l'analyse?
Le degré de détail et de profondeur de la description des liens analytiques devrait être adapté et approprié à la situation et au contexte d’évaluation. Les facteurs suivants sont notamment à considérer :
- la nature de la demande de services (p. ex. : expertise légale ou réadaptation fonctionnelle?);
- la présence de risques de préjudice ou d’enjeux relatifs aux droits, aux intérêts, au bien-être ou à l’intégrité d’une personne; (p. ex. : obtention d’une aide financière ou d’une ressource; jouissance d’un privilège comme le permis de conduire; décision d’appliquer une contention, refus d'un soin);
- le potentiel de litige;
- le degré de complexité de la situation.
De plus, bien qu’il soit attendu que l’ergothérapeute ait une pratique basée sur les données probantes et que la référence explicite à celles-ci ne soit pas d’emblée nécessaire, elle peut néanmoins, dans des contextes particuliers (par exemple, dans les situations d’expertise), s’avérer une bonne pratique. Pour en savoir plus, voir l’article « L’ergothérapeute comme témoin expert à la cour : l’obligation d’agir avec objectivité et impartialité », publié dans l’Ergothérapie express de juin 2010.
Vous trouverez des exemples d’analyse dans les divers extraits de rapport en ergothérapie provenant du module 5 de la formation Balises entourant la rédaction des écrits en ergothérapie pour une clientèle atteinte de troubles neuropsychologiques ou mentaux.
Exposé clair faisant ressortir les particularités de l'ergothérapie
Les éléments du résultat de l’évaluation doivent être exposés de façon à faire ressortir les particularités de l’ergothérapie.
Pour ce faire, il est utile de se centrer sur le champ d’exercice de la profession. En ce sens, il est attendu de tout ergothérapeute que les éléments de résultat de son évaluation établissent clairement ses liens avec les habiletés fonctionnelles du client.
De plus, l’utilisation d’un modèle conceptuel centré sur l’occupation (ex : MCREO, PEO, MOHO) peut contribuer à faire ressortir les particularités de l’ergothérapie et favoriser la clarté de son exposé :
- l’utilisation de la terminologie associée au modèle conceptuel permet de faire ressortir les concepts centraux de la profession eu égard à l’occupation, tels l’engagement occupationnel, le statut occupationnel, les enjeux occupationnels, etc.
- l’organisation des données en fonction de l’articulation des concepts du modèle peut contribuer à la clarté de l’exposé.
Votre façon de rendre compte du résultat de l’évaluation et de l’analyse est-elle conforme?
Pour le savoir, répondez à ce Questionnaire d’autoévaluation.
Documents relatifs à cet article
- Référentiel de compétences lié à l'exercice de la profession d'ergothérapeute au Québec
- « Agir dans son champ d’exercice : la vigilance s’impose! », Ergothérapie express, mars 2010
- « L’ergothérapeute comme témoin expert à la cour : l’obligation d’agir avec objectivité et impartialité », Ergothérapie express , juin 2010
- Exemples d’analyse dans les divers extraits de rapport en ergothérapie provenant du module 5 de la formation Balises entourant la rédaction des écrits en ergothérapie pour une clientèle atteinte de troubles neuropsychologiques ou mentaux
- Questionnaire d’autoévaluation : Résultat de l’évaluation et son analyse
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