Chroniques de l'ergothérapie
Retour à la listeMathieu, 18 ans, présente une infirmité motrice d’origine cérébrale (paralysie cérébrale) qui lui cause de légères difficultés à coordonner les mouvements de ses jambes. Il souhaite acquérir plus d’autonomie dans ses déplacements en obtenant son permis de conduire. Il ne sait toutefois pas si cela sera possible compte tenu de sa condition.
Marc, 28 ans, a été impliqué dans un accident de la route il y a quelques mois, subissant un traumatisme craniocérébral. Il a de la difficulté à demeurer concentré sur ce qu’il fait, car les bruits et les objets environnants le distraient facilement. En raison de son état de santé, son permis de conduire a été temporairement suspendu. Marc n'a donc pas conduit depuis son accident. Il souhaite retrouver son autonomie le plus rapidement possible.
Murielle, 82 ans, a obtenu son permis de conduire il y a plus de 40 ans. Son médecin de famille a récemment signalé à la Société de l’assurance automobile du Québec (SAAQ) les différents diagnostics qui affectent son état de santé. Après avoir analysé ce rapport, la SAAQ demande à Murielle de lui faire parvenir un rapport d’évaluation sur sa capacité à conduire rédigé par un ergothérapeute.
La conduite d’un véhicule est une préoccupation pour toutes ces personnes et chacune peut recevoir les services d’un ergothérapeute.
Les objectifs en ergothérapie dans le domaine de la conduite automobile
L’exercice de l’ergothérapie dans le domaine de la conduite de véhicules routiers couvre une vaste étendue d’activités professionnelles. Celles-ci incluent entre autres :
- le maintien des habiletés requises pour une conduite autonome et sécuritaire;
- le dépistage des conducteurs à risque;
- l’évaluation des habiletés fonctionnelles requises à l’activité de conduire;
- l’établissement d’un plan d’intervention en vue de permettre à une personne :
- d’utiliser un véhicule en tant que conducteur ou passager, ou
- de pallier la perte de son permis de conduire.
Un tel plan d’intervention peut notamment comporter :
- la recommandation d’une période d’entraînement visant la révision des techniques de conduite;
- une modification des habitudes de conduite de la personne;
- un développement de l’autonomie à conduire ou à accéder à un véhicule adapté, incluant les recommandations en matière d’adaptation du véhicule;
- l’accès à des moyens de transport alternatifs.
L’évaluation en ergothérapie
Le Code de la sécurité routière prévoit que la SAAQ peut demander qu’une personne se soumette à une évaluation par un professionnel de la santé qu’elle désigne. L’ergothérapeute est l’un des professionnels mentionnés dans la loi. Cependant, toute personne peut demander une évaluation par un ergothérapeute sans que celle-ci soit exigée par la SAAQ.
L’évaluation en ergothérapie comprend généralement deux étapes : 1) l’évaluation des préalables à une conduite autonome et sécuritaire, et 2) l’évaluation sur route de l’aptitude à conduire.
La première étape vise à obtenir une appréciation des habiletés requises pour conduire un véhicule. On songe ici à l’attention, la concentration, la mobilité, la coordination des mouvements, la perception visuelle, etc. À ce moment, l’ergothérapeute en profite pour discuter avec son client de ses habitudes de conduite, de ses activités quotidiennes, de ses rôles familiaux, de ses attentes et de ses projets en lien avec la conduite automobile. L’analyse de l’ensemble de ces données permet à l’ergothérapeute de bien connaître son client et de préparer la seconde étape de son évaluation : l’évaluation sur route.
L’évaluation sur route a essentiellement pour but d’évaluer l’aptitude du client à conduire un véhicule routier. Elle permet à l’ergothérapeute de déterminer les conditions qui permettraient une conduite autonome et sécuritaire et de faire les recommandations appropriées. Par exemple, l’ergothérapeute pourrait recommander de faire adapter le véhicule à l’aide d’équipements spécialisés, de modifier les habitudes de conduite, dont une conduite se limitant à un environnement familier, ou de proposer une période de cours pour rafraîchir la maîtrise de techniques de conduite.
À la fin du processus d’évaluation, l’ergothérapeute doit indiquer s’il considère son client apte à conduire et, si oui, dans quelles conditions. L’ergothérapeute transmet ses recommandations à la SAAQ qui prend alors les décisions relatives au permis de conduire de la personne, en fonction des renseignements et des rapports qu’elle détient sur le conducteur et son état de santé.
En fonction de cette décision, l’ergothérapeute appliquera un plan d’intervention approprié à la situation particulière de son client. En voici quelques exemples.
L’intervention en ergothérapie auprès de Mathieu, Marc et Murielle
Mathieu a eu la confirmation de la SAAQ que sa condition de santé est compatible avec la conduite automobile. Il a rencontré une ergothérapeute pour qu’elle statue sur son aptitude à conduire en vue d’obtenir son permis d’apprenti conducteur. L’analyse de la situation mène l’ergothérapeute à recommander une adaptation du véhicule par l’ajout de commandes manuelles qui remplaceront les pédales de frein et d’accélérateur. En effet, les difficultés de Mathieu ne lui permettent pas d’utiliser ses jambes pour conduire. La SAAQ ayant accepté les recommandations de l’ergothérapeute, Mathieu peut commencer son apprentissage de la conduite automobile à l’aide d’un véhicule adapté. Au moment où Mathieu voudra se procurer un véhicule en vue de le faire adapter, l’ergothérapeute l’accompagnera dans ses démarches, notamment pour choisir un véhicule pouvant recevoir les adaptations requises et pour faire la demande de financement au programme d’adaptation des véhicules de la SAAQ.
Marc a été évalué par l’ergothérapeute, en salle et sur la route, et l’examen a décelé que ses difficultés d’attention sont encore trop importantes pour permettre une conduite autonome et sécuritaire. Facilement distrait par un environnement en mouvement (objets, véhicules, piétons), Marc n’arrive pas à gérer l’ensemble de l’information visuelle qui se présente à lui. Comme il est encore suivi par une équipe d’intervenants qui lui offrent des services de réadaptation, l’ergothérapeute recommande de maintenir la suspension temporaire de son permis et de procéder à une nouvelle évaluation dans six mois. À ce moment, ses progrès en réadaptation lui permettront peut-être de reprendre la conduite.
Murielle a aussi été évaluée par un ergothérapeute, en salle et sur la route. L’évaluation en salle ne démontre qu’un léger ralentissement des fonctions motrices. Sur la route, l’ergothérapeute observe que Murielle a certaines habitudes de conduite qui gagneraient à être améliorées afin d’assurer une meilleure sécurité, en particulier sur les autoroutes. L’ergothérapeute recommande à la SAAQ le maintien du permis jumelé à des séances de rafraîchissement des techniques de conduite en compagnie d’un moniteur de conduite.
Les lieux d’exercice
Au Québec, les ergothérapeutes offrent des services liés à l’utilisation des véhicules routiers dans une grande variété de lieux d’exercice. La plus grande proportion d’ergothérapeutes qui évaluent l’aptitude à conduire et qui recommandent des adaptations de véhicule exercent leur profession dans les centres de réadaptation en déficience physique (CRDP). Nombreux sont ceux toutefois qui offrent de tels services dans le secteur privé alors que d’autres le font dans des centres de santé et de services sociaux (CSSS).
Pour obtenir des services d’ergothérapie en lien avec la conduite automobile, communiquez avec le CSSS ou le CRDP de votre région ou consultez le Répertoire des ergothérapeutes du secteur privé de l’Ordre des ergothérapeutes du Québec.
La Société de l’assurance automobile du Québec fournit également tous les renseignements requis quant aux permis de conduire de même qu’à son programme d’adaptation des véhicules.