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Retour à la listeSont cosignataires de cette lettre
Paul-André Gallant, MBA, MPO, orthophoniste, président, Ordre des orthophonistes et audiologistes du Québec.
Alexandre Nadeau, erg, M. ERG, président, Ordre des ergothérapeutes du Québec.
Josée Landry, M.A., c.o., présidente, Ordre des conseillers et conseillères d’orientation du Québec.
Félix-David Soucis, ps.éd., président, Ordre des psychoéducateurs et psychoéducatrices du Québec.
Dre Christine Grou, psychologue, présidente, Ordre des psychologues du Québec
La rentrée scolaire est bien installée et parallèlement le Québec est en pleine campagne électorale, campagne qui n’a pas permis de faire ressortir suffisamment les besoins pressants pour les élèves d’obtenir des services de soutien. Certes, les différentes plateformes proposent des ajouts de sommes d’argent, des ressources numériques, etc. On fait aussi état des problèmes : pénurie d’enseignants, de professionnels, d’établissements vétustes, mais très peu des réels besoins des élèves. La forte croissance du nombre d’élèves ayant des besoins particuliers, conjuguée au problème d’accessibilité à des ressources professionnelles entraine une forte pression sur les services d’aide à l’élève.
Malgré tout on joue dans le même film qu’il y a 4, 10 ou 20 ans, en oubliant qu’on a atteint un point de rupture qui nous oblige à voir la mission de l’école autrement. Le modèle d’intervention actuel basé sur une individualisation des mesures d’aide ne suffit plus à la demande.
Tous les partis s’entendent qu’il faille aider davantage les élèves handicapés ou en difficultés d’adaptation ou d’apprentissage. Mais peut-être faut-il le faire différemment ? En agissant seulement sur les individus, nous n’avons clairement pas atteint cet objectif. Pourtant dès 2017, le Conseil supérieur de l’éducation nommait cet état de fait et prônait l’éducation inclusive. On invitait déjà les milieux scolaires à « agir non seulement sur les individus, mais également sur l’environnement, y compris les attitudes, les pratiques et l’organisation, et à effectuer des changements qui réduisent et parfois même suppriment les obstacles à l’apprentissage. L’action sur ces barrières devient la responsabilité de l’ensemble des personnes qui interviennent auprès des élèves, tant au sein de la famille, de la classe ou de l’école que de la communauté ».
En accord avec cette affirmation, et au regard des enjeux récurrents en éducation, nous croyons qu’un virage majeur doit s’amorcer dans les écoles québécoises. Le modèle biomédical où le diagnostic est la porte d’entrée des services professionnels n’est plus viable. D’ailleurs, le gouvernement dans un geste audacieux tente d’éliminer les codes administratifs associés à des diagnostics pour que les professionnels puissent se concentrer sur les besoins d’un plus grand nombre d’élèves ; c’est un pas dans la bonne direction. Néanmoins, l’identification et la réponse aux besoins doivent se faire dans une perspective inclusive dans l’ensemble de l’environnement scolaire de l’élève incluant la classe, la cour d’école, le service de garde, etc. Partager cette responsabilité entre l’ensemble des intervenants scolaires et prendre le temps nécessaire à des échanges et à la mise en place de pratiques inclusives sont des conditions sine qua non. Au centre de cette concertation, il y a les enseignants qui décèlent les difficultés des élèves et qui doivent user d’ingéniosité au quotidien dans le contexte d’apprentissage de leur classe. Or une inclusion réussie exige d’unir nos forces pour élargir les cibles d’intervention et réduire voire même éliminer les obstacles qui se dressent sur le parcours scolaire des élèves. Pour y parvenir, nous croyons qu’il faut un leadership fort des plus hautes instances (gouvernement, ministères, syndicats) pour envoyer un message clair dans les milieux d’éducation que le statu quo n’est plus une option. Certains y sont d’ailleurs arrivés et des projets d’éducation inclusive inspirants existent déjà. Ces orientations doivent être concertées, éthiques, judicieuses et alignées avec la mission de l’école pour déterminer les modalités de prestation de services à mettre en œuvre et pour équilibrer la charge de travail de l’ensemble du personnel scolaire.
Nous croyons ainsi qu’il est temps de faire un point d’arrêt, une réflexion collective et profonde sur les services d’aides à l’élève. Alors que les contraintes pandémiques sont moins présentes et qu’on ne jure que par un retour à la normale, souhaitons-nous vraiment retourner à des façons de faire qui n’engendrent pas les changements escomptés ?
Il s’agit certes d’une année scolaire chargée d’enjeux en éducation, mais ceux-ci génèrent également plusieurs opportunités pour réfléchir à la réussite autrement. Dans un souci de favoriser la réussite éducative et sociale de tous les élèves, ce changement de paradigme est nécessaire.
Référence :
Conseil supérieur de l’éducation (2017, octobre). Pour une école riche de tous ses élèves. S’adapter à la diversité des élèves, de la maternelle à la 5e année du secondaire https://www.cse.gouv.qc.ca/wp-content/uploads/2017/10/50-0500-AV-ecole-riche-eleves.pdf