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Retour à la listeDans le contexte de pandémie actuelle, les ergothérapeutes sont parfois confrontés à des situations inhabituelles ou délicates qui soulèvent de nombreux questionnements, notamment eu égard au respect de leurs obligations déontologiques.
L’Ordre est soucieux de soutenir ses membres à cet égard, c’est pourquoi nous souhaitons répondre aujourd’hui à deux questions qui nous ont été soumises par des membres concernant l’étendue de leur obligation de confidentialité lorsque, dans le cadre de leur travail, ils ont des motifs raisonnables de croire que :
- un de leur client refuse ou néglige de respecter les mesures de confinement ou de distanciation liées à la pandémie de COVID-19;
OU
- un de leur client aîné est victime de maltraitance.
Vous trouverez ci-dessous un résumé des règles applicables en matière de respect du secret professionnel, suivi de renseignements pertinents relativement à chacune de deux situations énoncées ci-avant.
Rappel de la règle générale
Il importe dans un premier temps de rappeler que l’article 48 du Code de déontologie des ergothérapeutes stipule que l’ergothérapeute doit respecter le secret de tout renseignement de nature confidentielle qui vient à sa connaissance dans l’exercice de sa profession.
L’ergothérapeute ne peut être relevé du secret professionnel que :
- lorsque le client l’autorise; ou
- lorsque la loi l’ordonne ou l’autorise par une disposition expresse.
Compte tenu du fait que la situation où le client autorise l’ergothérapeute à briser son secret professionnel est moins problématique et certainement moins susceptible de se produire dans les deux cas examinés ci-après, nous nous concentrerons sur la seconde exception prévue à l’article 48 du Code de déontologie, à savoir celle où la loi ordonne ou autorise l’ergothérapeute à briser son secret professionnel.
Client qui refuse de respecter les consignes de la santé publique
Q. Est-ce qu’un professionnel peut dévoiler une information soumise au secret professionnel afin de dénoncer le non-respect par un client des mesures de confinement ou de distanciation liées à la pandémie de COVID-19 ?
R. La Loi sur la santé publique comporte certaines dispositions susceptibles de permettre à un professionnel de la santé, dans des situations bien précises, de dévoiler une information soumise au secret professionnel afin de dénoncer le non-respect par un client des mesures de confinement ou de distanciation liées à la pandémie de COVID-19.
Les dispositions à cet égard varient selon que le professionnel est un médecin ou un autre professionnel de la santé et selon l’endroit où il travaille.
a. dans le cas d'un médecin
Le médecin est tenu d’aviser le directeur de santé publique du territoire concerné lorsqu’il soupçonne une menace à la santé de la population.
Il ne doit cependant transmettre aucun renseignement personnel ou confidentiel avant que de tels renseignements ne lui soient exigés par l’autorité de santé publique concernée. (Articles 93 et 95 de la Loi sur la santé publique).
b. dans le cas d'un professionnel de la santé œuvrant dans un établissement de santé et de services sociaux
Il revient à l’établissement et non au professionnel de la santé de faire la dénonciation. De fait, au terme de la Loi sur la santé publique, les établissements de santé et de services sociaux doivent signaler au directeur de santé publique du territoire les situations où ils ont des motifs sérieux de croire qu’il existe une menace à la santé des personnes qui fréquentent leurs installations.
L’établissement ne doit cependant transmettre aucun renseignement personnel ou confidentiel avant que de tels renseignements ne lui soient exigés par l’autorité de santé publique concernée. (Articles 93 et 95 de la Loi sur la santé publique).
c. dans le cas d'un professionnel de la santé œuvrant hors du réseau de la santé et des services sociaux, dans un établissement qui constitue un milieu de travail ou un milieu de vie
Le professionnel de la santé qui œuvre hors du réseau de la santé et des services sociaux, dans un établissement qui constitue un milieu de travail ou un milieu de vie (par exemple : les entreprises, les établissements d’enseignement, les centres de la petite enfance et autres services de garde, les établissements de détention ou les maisons d’hébergement) peut signaler au directeur de santé publique du territoire concerné les situations où il a des motifs de croire qu’il existe une menace à la santé des personnes qui fréquentent cet établissement.
Il ne doit cependant transmettre aucun renseignement personnel ou confidentiel avant que de tels renseignements ne lui soient exigés par l’autorité de santé publique concernée. Cette exception s’applique aussi au PROFESSIONNEL qui est directeur d’un tel établissement. (Articles 94 et 95 de la Loi sur la santé publique)
d. importante distinction
Il importe de souligner que, contrairement au médecin qui doit dénoncer les situations de menace à la santé de la population en générale, le professionnel de la santé et l’établissement de santé et services sociaux ne peuvent pour leur part dénoncer que les situations où ils ont des motifs sérieux de croire qu’il existe une menace à la santé des personnes qui fréquentent leurs installations ou établissements.
Cela a évidemment pour effet de restreindre grandement les dénonciations possibles pour les ergothérapeutes, lesquels ne pourraient, par exemple, dénoncer un client qui reçoit uniquement des services à domicile puisque ce dernier ne menace pas la santé des personnes qui fréquentent l’établissement ou l’installation où œuvre l’ergothérapeute.
Q. Est-ce que l’exception prévue notamment à l’article 60.4 du Code des professions liée à la prévention des actes de violence permet à un professionnel de faire exception à son obligation de confidentialité afin de dénoncer un individu qui ne respecte pas les mesures de confinement ou de distanciation liées à la pandémie de COVID-19 ?
R. Non. Cette exception ne s’applique que pour la prévention d’un acte de violence envers une personne ou un groupe de personnes identifiable. De plus, une divulgation effectuée en vertu de cette disposition doit être faite uniquement aux personnes exposées à ce danger, à leur représentant ou aux personnes susceptibles de leur porter secours.
Le non-respect des mesures de confinement ou de distanciation ne constitue pas un acte de violence ni ne fournit, en soi, de motifs raisonnables de croire qu’un acte de violence sera commis.
Aîné victime de maltraitance
Q. Est-ce qu’un professionnel peut dévoiler une information soumise au secret professionnel afin de dénoncer la maltraitance envers un aîné ?
R. La réponse à cette question varie en fonction de la situation de la personne aînée :
a. Personne aînée en CHSLD ou inapte protégée – signalement obligatoire
La Loi visant à lutter contre la maltraitance envers les aînés et toute autre personne majeure en situation de vulnérabilité oblige tout prestataire de services de santé et de services sociaux ou tout professionnel (sauf l’avocat et le notaire) qui a un motif raisonnable de croire qu’une telle personne :
- hébergée en CHSLD; ou
- sous tutelle, sous curatelle ou à l’égard de laquelle un mandat d’inaptitude a été homologué, peu importe son lieu de résidence,
est victime de maltraitance de signaler une telle situation sans délai et ce, sans égard au fait que l’information est protégée par le secret professionnel.
Le signalement devra être effectué auprès du commissaire local aux plaintes et à la qualité des services de l’établissement si la personne y reçoit des services ou, dans les autres cas, au corps de police concerné. Pour connaître les coordonnées des commissaires de votre région, consultez la liste des CLPQS
b. Risque sérieux de mort ou de blessures graves – signalement possible
Au terme de l’article 60.4 du Code des professions, le professionnel peut communiquer un renseignement protégé par le secret professionnel en vue de prévenir un acte de violence, dont un suicide, lorsqu’il a un motif raisonnable de croire qu’un risque sérieux de mort ou de blessures graves menace un aîné et que la nature de la menace inspire un sentiment d’urgence.
On entend par « blessures graves » toute blessure physique ou psychologique qui nuit d’une manière importante à l’intégrité physique, à la santé ou au bien-être d’une personne ou d’un groupe de personnes identifiable.
Dans de telles circonstances, il importe de rappeler que le professionnel ne peut communiquer ce renseignement qu’à la ou aux personnes exposées à ce danger, à leur représentant ou aux personnes susceptibles de leur porter secours. Le professionnel ne peut communiquer que les renseignements nécessaires aux fins poursuivies par la communication.
c. Autres cas
Si la situation ne correspond à aucune des exceptions prévues par la loi, l’ergothérapeute est lié par son secret professionnel et ne peut divulguer une information confidentielle que si son client l’y autorise.